- Oban
Wild Card et Poker Menteur
Wild Card et Poker Menteur
Si je vous dis « Rugby », aujourd’hui, en 2016, à quoi pensez-vous ? Ballon ovale, affrontement, conquête, puissance, vitesse, golgoths surpuissants… Aujourd’hui, quand je lis régulièrement les gazettes, les sites, les forums, les déclarations des uns, les imprécations des autres, un seul mot me vient à l’esprit : Conquête de marchés. Aujourd’hui, ce sport n’est plus celui qui se voulait porteur de valeurs éducatives collectives, de respect au-delà de ce qu’on pouvait se coller dans la poire et le fondement. Il est devenu, par le professionnalisme dans lequel il s’est jeté corps et âme, un vecteur d’avidité cupide extrême et les seules valeurs qu’il véhicule aujourd’hui sont plus proches de celles de la bourse et du rendement à court terme que du sport sensu stricto.
Le jeu a évolué. La société évolue. Un nouveau public potentiel est apparu, beaucoup plus proche de celui du foot que de celui qui hantait les stades de rugby ces dernières années Et alors que personne, mais alors personne, n’avait à redire contre la répartition géographique des clubs du haut de la hiérarchie de ce sport il y a encore 20 ans, aujourd’hui, tout le monde veut en croquer. Parce qu’après tout, c’est bien de cela qu’il s’agit : En croquer, toucher au grisbi, s’en mettre plein les fouilles. Et pour cela, il faut des nouveaux marchés. Non, pas des clubs nouveaux dans le paysage, bâtis patiemment autour d’un développement centré sur la jeunesse, sur l’intéressement des spectateurs à un sport pas forcément culturellement implanté au départ, mais des consommateurs, des chalands qui viennent au stade pour voir le grand cirque des stars mondiales venues peupler le Barnum de l’ovalie nationale pour la plus grande fierté de voir des équipes de gladiateurs all-stars mettre la pâtée à celle des concurrents, et plus jouissif encore, à celles des pays voisins.
Alors, dans les gazettes, sur les forums, dans les déclarations des uns et les imprécations des autres, on peut lire des trucs aussi hallucinants que « Je vais faire changer le paysage de ce sport, les Historiques n’ont plus rien à y faire aujourd’hui » (Mourad B. lors de son arrivée à la tête du RCT alors en ProD2), « Le rugby est un sport spectacle dont le développement ne peut se faire par le biais d’une ProD2 qui offre un paysage de grabataires et qui ne peut rester un sport de sous-préfectures (Lu sur le forum rugbyfédéral.com), et je passe sur toutes les saloperies écrites depuis des mois par certains tenant d’un néolibéralisme rugbystique galopant qui pourrissent régulièrement les clubs des villes moyennes, surtout de ces « emmerdeurs maffieux » du Sud-ouest (Dont certains ont même fait de l’USD le porte étendard décrépit…) en leur prédisant la même disparition que celle qui toucha les dinosaures , frappés par la comète scintillante du bling-bling rugbystique.
Le rugby des métropoles comme le réclament à corps et à cris les mécènes des clubs nouveaux riches de l’élite nationale a eu comme étendard le club de Lille, détruit par la gestion merdique et désastreuse d’entrepreneurs qui pensaient qu’un club de spot professionnel c’est comme le supermarché du coin, ou le fast-food d’à côté. Nonobstant qu’il a ouvertement bravé les règles de bonne gestion imposées, et acceptées par les instances dirigeantes, il a bénéficié de l’appui honteux du magnat toulonnais, de certains ex-joueurs majeurs de ce sport, de politiques en campagnes plus préoccupés de glaner des voix en brossant les gens dans le sens du poil et de certains supporters d’autres clubs, surtout enclins à s’en prendre à la mafia du Sud-ouest responsable de tous les maux dont souffre ce sport. Aujourd'hui, certains attendent et exigent avec une impatience cupide sans limite l’émergence de clubs artificiels dans des bassins économiques jugés alléchants et vitaux : Nantes, Strasbourg, Lille, Rouen reviennent en permanence en tête de la liste : Lille, avec sa ville de plus de 230000 habitants et sa communauté urbaine de plus d’1200000 d’âmes, Nantes, ses presque 300000 habitants dans une CU de 910000 habitants, Strasbourg, 275000 habitants intra muros et 770000avec les banlieues, Rouen, 110000 habitants dans une aire urbaine de 660000 normands.
Foutre Dieu ! Quand on observe les affluences moyennes de la saison passée en Top14, l’UBB arrive en tête avec moins de 24000 spectateurs par an (243000 hab/1178000 hab dans l’aire urbaine), Toulon suit avec moins de 19500 spectateurs de moyenne (163000/630000 hab), Clermont vient ensuite devant Toulouse, et je ne parle même pas du cancre de la classe sous perfusion Lorenzetienne qui rassemble moins de 9000 fidèles par match à Colombes. Alors, pour remplir des stades de moins de 25000 places, il faut des bassins de plusieurs centaines de milliers de spectateurs potentiels ?!!!!! Ben voyons !
Pourquoi ne pas parler de Nevers et de son modèle centré sur une entreprise ? Nevers, au regard des aspirations grandiloquentes de la ligue et de tous ceux qui rêvent d’un rugby des grandes villes, c’est un nain de 35000 habitants dans une aire urbaine dépassant à peine 100000 habitants. Mais c’est un club qui remplit son stade de 7500 places en Fed1. Pourquoi ne pas parler surtout du RC Vannes ? Le Breton, c’est connu, il est têtu, et quand il se lance dans une aventure, il la peaufine, il la bichonne, il la travaille, patiemment, obstinément… Et le RCV, depuis plus de 15 ans, il s’est fixé un objectif : La ProD2, le professionnalisme. Alors il a développé ses structures, il s’est créé une vraie identité, il a dépassé les murs de sa cité et est allé fédérer autour de lui, dans le Morbihan certes, mais partout en Bretagne. Et il a réussi. Et son stade de 9000 places, il le remplit plus qu’à son tour.
Alors tout ça pour dire deux choses :
- La simple évocation d’une wild card pour un club « du nord » en Fed1, associée à la subvention de 800000 euros allouée pour l’aider à s’implanter en ProD2 relève du plus profond déni du sportif et du plus profond mépris pour les autres, du sud en particulier, sud-ouest semblant là encore visé. Imaginez ces « couillons de Gascons » auscitains, ou les ours Tarbais finir seconds sportivement, et sains financièrement, se faire souffler la montée par Nevers, Bourg ou Rouen pour des considérations totalement extra sportives, parce que certains « en haut » auront eu le bon vouloir de . Elles sont où l’équité et l’éthique, elles sont où les valeurs que ce sport a toujours proclamé défendre (ce qui n’a pas toujours été aussi clair que ça, il faut quand même l’avouer). Le rugby des métropoles est resté à la porte avec Lille, « ils » vont tout faire pour le faire rentrer par la fenêtre.
- J’avais écrit par ailleurs que le salut de l’USD, mais aussi des amateurs de rugby du coin, passait par la fédération des volontés, par le dépassement des murs de Maurice Boyau et du Boulevard Lassaossa. Sur un pur plan démographique, l’USD, si elle voulait simplement s’en donner la peine, pourrait être le club d’une communauté de 150000 personnes en se limitant exclusivement à un triangle Mimizan-Amou-Labenne (J’exclue volontairement Tarnos, ils veulent rejoindre Bayonne, ne leur manquent plus qu’un 64 au cul de leurs véhicules… Ceci dit sans amertume envers eux, ils ne sont après tout qu’à quelques encablures de Jean Dauger, et sont finalement une banlieue des la cité… Gasconne de l’embouchure.). Mais voilà. Pour ça, il faudrait une volonté. Une volonté de s’ouvrir, ne plus être le club du « Chez eux à Dax » tel qu’il est perçu hors de la cité thermale. Il faudrait que les clubs alentour soient impliqués dans un tel projet. Et il faudrait que le stade, présent é comme pouvant accueillir 16000 spectateurs mais qui en accueille en moyenne à peine plus de 3300 (Il faut dire que 12000 des 16000 places annoncées sont des places debout…) puisse devenir une arène moderne plus à même d’attirer les supporters qu’elle ne l’est actuellement. L’avenir de l’USD n’est plus entre ses seules mains, toute la région doit se sentir concernée si les amateurs de rugby veulent encore avoir un minimum le sentiment d’exister et d’être considérés